De l’énergie propre dans nos eaux usées ! Hystep innove pour produire de l’hydrogène vert

Sciences et technologies Article
Issue du laboratoire LEPMI, la future start-up grenobloise Hystep relève à la fois le défi de la transition énergétique et celui de la valorisation de nos déchets. Deux défis et un objectif : produire de l’hydrogène décarboné et à bas coût à partir du retraitement des eaux usées.
"Nous développons un procédé de dépollution des eaux qui permet de produire de l’hydrogène de façon plus écologique en économisant l’électricité". En septembre dernier lors du Forum 5i organisé par Grenoble-Alpes Métropole, Loïc Michel, jeune docteur de l’UGA et porteur du projet Hystep au sein du laboratoire LEPMI, présentait les objectifs de sa future start-up.

Loïc Michel dans son laboratoire au LEPMI

Accompagné par Linksium, la société d’accélération du transfert de technologies de Grenoble Alpes, et par le service valorisation de l’UGA, Hystep entend devenir un pionnier dans le marché de la valorisation énergétique de la biomasse issue des eaux usées.

Lauréat en 2020 de la 1re édition du concours national d’innovation i-PhD, Hystep poursuit son développement et celui de l’énergie de demain. Après un programme de maturation technologique de 18 mois au sein de Linksium, le projet est entré en 2021 en incubation.

Une valorisation de la recherche publique et… de la biomasse

Issu du Laboratoire d’électrochimie et de physicochimie des matériaux et des interfaces (LEPMI - UGA, Grenoble INP-UGA, USMB, CNRS), le projet Hystep s’appuie sur les résultats de recherche de Gérard Merlin, professeur au Laboratoire d’optimisation de la conception et ingénierie de l’environnement (LOCIE - USMB, CNRS) et spécialiste du traitement biologique des eaux usées, et de Jonathan Deseure, maître de conférences au LEPMI et spécialiste des technologies de production de l’hydrogène.

Impliqués dans l’aventure "Hystep" en tant que conseillers scientifiques, les deux enseignants-chercheurs de l’Université Savoie Mont Blanc et de l’UGA ont développé le concept avec Pierre Belleville lors de sa thèse (soutenue en 2018), avant que le projet de transfert de technologie ne soit poursuivi par Loïc Michel, docteur en physique de l’UGA en 2019.

Brevetée et protégée par l’UGA, la technologie Hystep repose sur le couplage de deux procédés désynchronisés. Une pile à combustible microbienne va d’abord dégrader la matière organique polluante et la valoriser en électrons. Ces électrons sont stockés dans un médiateur chimique qui sera dans un second temps électrolysé pour produire l’hydrogène. Cette technologie permet un rendement de 90% dans le stockage et la réinjection de l’électricité par la voie hydrogène.

Une source d’énergie verte produite au plus près des besoins

Le marché visé par Hystep est celui du traitement des eaux fortement biodégradables, comme les eaux usées domestiques, mais aussi des effluents plus concentrés d’origine agro-alimentaire. En donnant la possibilité aux exploitants d’améliorer à la fois l’efficacité et la rentabilité de leurs unités de traitement des eaux usées, les perspectives de développement semblent prometteuses. "Le marché de la rénovation des infrastructures d’épuration est orienté vers la baisse des coûts par l’efficacité et la valorisation énergétique", rappelle notre jeune docteur-entrepreneur.

Parce qu’il renferme quatre fois plus d’énergie par kilogramme que le charbon et trois fois plus que le pétrole, l’hydrogène est considéré aujourd’hui comme l’une des clefs essentielles pour "décarboner" les transports lourds et l’industrie. Cependant, pour des raisons historiques et de coût, l’hydrogène reste produit à 95% à partir d’énergies fossiles via des procédés fortement émetteurs de gaz à effet de serre. La production d’hydrogène par électrolyse sans émission de CO2, et à bas prix, est donc un enjeu majeur pour la transition énergétique.

La technologie Hystep offre une grande efficacité d’électrolyse. Une efficacité qui est cruciale pour le stockage/réinjection de l’électricité et la gestion des intermittences de production ou de consommation. Installé dans les unités de traitement des eaux, le procédé mis au point devrait permettre une production d’hydrogène décentralisée au plus près des besoins. Mobilité, injection sur le réseau, méthanation de biogaz… Grâce à une étude de marché réalisée par Linksium, les débouchés préférentiels de l’hydrogène ont pu être mieux identifiés.

Un dispositif innovant testé en conditions réelles à Aquapole

Loïc Michel a validé en laboratoire le prototypage du système bio-électrochimique et travaille actuellement sur un prototype en environnement réel. Une étape essentielle pour le développement de la future start-up.

Loïc Michel sur le site d’Aquapole

Pour tester le dispositif en conditions réelles, Grenoble-Alpes Métropole a accepté d’ouvrir les portes de sa station d’épuration. Déjà pionnière dans la production de méthane à partir de ses boues, Aquapole traite actuellement les eaux usées d’environ 500 000 habitants. "Sur une station de cette taille, le procédé Hystep permettrait de produire 750 kg d’hydrogène vert par jour, soit la consommation de 75 bus. "

Depuis plusieurs années, le développement de la filière hydrogène, récemment soutenue par les plans de relance, ouvre des opportunités inédites pour l’hydrogène décarboné et donc pour Hystep. Pour Loïc Michel, la suite du projet va se jouer en équipe avec la création prochaine de la start-up : "Nous pourrons alors développer des partenariats pour une démonstration à échelle industrielle et envisager la commercialisation de notre innovation technologique."
Publié le18 janvier 2021
Mis à jour le19 janvier 2021