Le rêve de route américain
Société
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Susanne Berthier-Foglar est professeur de civilisation américaine et directrice du Centre d'étude sur les modes de la représentation du monde anglophone (CEMRA), une équipe de l’Institut des langues et cultures d’Europe, d’Amérique, Afrique, Asie et Australie (ILCEA4) . Ses travaux de recherche portent notamment sur l’histoire de l’Ouest américain et les constructions identitaires.
« Les États-Unis se sont construits sur la route. Depuis la conquête de l’Ouest, les Américains ont grandi avec l’idée que si la vie est meilleure un peu plus loin, on vend la ferme et on va s’y installer. Plus tard, au moment de la Grande Dépression, les habitants des plaines centrales ont fui la sécheresse et la famine partant massivement en direction de la Californie, faisant ainsi naître le mythe de la route 66. À l’ouest, certaines villes, comme Los Angeles par exemple, ont été véritablement construites pour les voitures et traverser une rue à pied n’est pas possible, cela équivaudrait à traverser des voies d’autoroute. Au moment de la crise pétrolière des années 1970 puis lors des accords de Kyoto qui visaient à réduire les gaz à effet de serre, les Américains ont refusé de remettre en cause leur mode de vie en rejetant toutes modalités de contrôle de leur industrie : ils voulaient garder leurs voitures, leurs routes, et ceux qui s’y opposaient sont apparus comme étant des anti-américains empêchant les États-Unis de se développer.
Aujourd’hui encore la route est très fortement ancrée dans la culture américaine et sa société contemporaine demeure en perpétuel mouvement. De nombreux retraités vendent leur maison, achètent un camping-car et partent sillonner le pays. D’une certaine façon, ils répètent la conquête de l’Ouest et essayent de reproduire cette réalité dans leur quotidien : ils vont se faire du café et griller des tranches de lard sur le feu parce que c’est ce que faisaient les cow-boys. Il y a aussi une forme de vie sociale qui se construit entre ces voyageurs qui se retrouvent dans les mêmes endroits créant de véritables cheminements de migrations : le sud de l’Arizona, les terres internes de la Californie…
Au cinéma, le road-movie va venir entretenir ces fantasmes d'aventure, de liberté et de rêve de route. Quand on pense à des road-movies emblématiques comme Easy Rider, on se rappelle des paysages mythiques de l’Ouest et des rêves de liberté des protagonistes. On occulte la fin tragique où ils se font tuer les uns après les autres par des gens qui n’acceptent pas la liberté que représente leur différence. Dans Thelma et Louise, on se souvient du côté jubilatoire de la route et de la scène finale où la voiture vole et se fige dans le paysage pour l’éternité sans jamais s’écraser. On ne veut pas voir/savoir. De la même manière dans le road-movie, la pollution n’existe pas. On ne traverse pas de ville, on n’est jamais dans des embouteillages… On est peut-être en panne parfois, mais la panne fait partie de l’imaginaire de la route. »
Aujourd’hui encore la route est très fortement ancrée dans la culture américaine et sa société contemporaine demeure en perpétuel mouvement. De nombreux retraités vendent leur maison, achètent un camping-car et partent sillonner le pays. D’une certaine façon, ils répètent la conquête de l’Ouest et essayent de reproduire cette réalité dans leur quotidien : ils vont se faire du café et griller des tranches de lard sur le feu parce que c’est ce que faisaient les cow-boys. Il y a aussi une forme de vie sociale qui se construit entre ces voyageurs qui se retrouvent dans les mêmes endroits créant de véritables cheminements de migrations : le sud de l’Arizona, les terres internes de la Californie…
Au cinéma, le road-movie va venir entretenir ces fantasmes d'aventure, de liberté et de rêve de route. Quand on pense à des road-movies emblématiques comme Easy Rider, on se rappelle des paysages mythiques de l’Ouest et des rêves de liberté des protagonistes. On occulte la fin tragique où ils se font tuer les uns après les autres par des gens qui n’acceptent pas la liberté que représente leur différence. Dans Thelma et Louise, on se souvient du côté jubilatoire de la route et de la scène finale où la voiture vole et se fige dans le paysage pour l’éternité sans jamais s’écraser. On ne veut pas voir/savoir. De la même manière dans le road-movie, la pollution n’existe pas. On ne traverse pas de ville, on n’est jamais dans des embouteillages… On est peut-être en panne parfois, mais la panne fait partie de l’imaginaire de la route. »
Publié le14 juin 2017
Mis à jour le12 juin 2017
Mis à jour le12 juin 2017
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