The Conversation : "Les outils digitaux, partenaires du bien-vieillir des seniors"

Société Article
Les « Engagés » constituent une catégorie de seniors particulièrement adeptes du digital pour les accompagner dans leur pratique sportive. AnnaStills / Shutterstock
Les « Engagés » constituent une catégorie de seniors particulièrement adeptes du digital pour les accompagner dans leur pratique sportive. AnnaStills / Shutterstock
Si les nouvelles technologies contribuent à se maintenir en bonne santé, certaines personnes âgées hésitent encore à les utiliser, par méfiance ou manque de maîtrise.
« Viens voir ! Encore un joggeur ! » Durant le confinement lié au Covid-19, la pratique d’une activité physique était l’un des cinq motifs autorisés pour quitter son domicile.


Si certains ont saisi cette opportunité pour sortir de chez eux tout en bougeant, d’autres ont préféré « jouer à domicile » et se sont tournés vers les outils digitaux pour les guider et les accompagner dans la pratique d’une activité physique. Ils ont eu recours à des moyens variés : cours en ligne, challenges individuels ou de groupe, applications fitness, groupes publics ou privés, communautés, etc.

Sur le réseau social Instagram, le nombre de commentaires liés au sport a augmenté de 266 % suite au confinement. Au final, les Français ont en moyenne maintenu leur nombre de pas quotidiens.

Mais qu’en est-il des seniors ? Ont-ils bénéficié comme le reste de la population des outils digitaux pour pratiquer régulièrement une activité physique ?

Rester actif pour mieux vieillir

Les seniors, qui sont-ils ? Les personnes de plus de 50 ans pour les recherches en marketing, de plus 45 ans dans le monde de l’entreprise ou encore de plus de 65 ans pour le corps médical. Nous faisons le choix d’employer le terme « senior » pour les personnes de 60 ans et plus car cet âge correspond au passage à la retraite qui va considérablement restructurer leur quotidien.

Certaines initiatives ont été menées pour permettre aux seniors de pratiquer une activité physique adaptée et éviter l’écueil d’une sédentarité qui peut très rapidement s’installer.

Cours de sport en ligne sur la chaîne YouTube de la Fédération française de la retraite sportive.


Soulignons une initiative qui dénote : les courtes vidéos de Véronique Villèle (@VillleDe) diffusées sur RTLsoir et annoncées sur Twitter.

 Capture d’écran du compte Twitter de Véronique de Villèle. @VillleDe
Capture d’écran du compte Twitter de Véronique de Villèle. @VillleDe


L’enjeu était de taille : lutter contre les effets néfastes du vieillissement, potentiellement accélérés par l’isolement et une baisse d’activité physique.

En effet, il est largement admis que la pratique régulière d’une activité physique adaptée est un important levier du « bien-vieillir », c’est-à-dire de l’adaptation continue des objectifs personnels et des comportements visant à minimiser les pertes et à maximiser les gains liés à l’avancée en âge.

La façon dont les seniors abordent et souhaitent vivre leur vieillissement dépend de la manière dont ils perçoivent leur niveau de vieillissement, de leur santé objective, de leur situation familiale et professionnelle ou encore de leur situation financière.

Toutefois, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) préconise de pratiquer au moins 150 minutes d’activité physique d’intensité modérée par semaine pour les 65 ans et plus.

Diminution du risque de chute, amélioration des capacités cognitives ou encore diminution du risque de développer une maladie chronique, les bénéfices sont présents quel que soit l’âge du début de la pratique.

Le digital, un allié pour la santé

Les outils digitaux ont leur place dans le bien-vieillir en contribuant à lutter contre les pertes liées au vieillissement comme les déficits sensoriels et cognitifs, la diminution de la mobilité ou encore la réduction des interactions sociales.

L’installation de détecteurs de chute au sein du domicile, l’utilisation d’outils de surveillance de la santé (tension, glycémie, télémédecine, etc.), mais aussi le maintien des liens avec les proches ou avec des associations constituent des aides efficaces.

Outre les réseaux sociaux classiques, type Facebook ou Twitter, de nouveaux réseaux font leur apparition en étant dédiés aux seniors. C’est le cas de « Ammy » qui permet de communiquer non seulement avec ses proches mais aussi avec des professionnels de santé ou encore des bénévoles de diverses associations. L’application « Papoti » permet également aux seniors de rester en contact facilement avec leurs petits-enfants.

Par ailleurs, certains outils digitaux peuvent accompagner les seniors dans leurs programmes d’activité physique grâce à des fonctionnalités telles que la définition d’objectifs personnalisés, les retours d’information sur l’activité réalisée, des contenus adaptés, le partage d’expériences, etc. L’application « Qalyo » permet ainsi grâce à une interface adaptée de suivre sa santé en contrôlant différents paramètres : poids, tension ou encore activité physique.

À lire aussi : Comment rester en forme après 60 ans

En dépit des bénéfices avérés de l’activité physique sur le bien-vieillir, et du potentiel démontré des outils digitaux pour favoriser la pratique régulière de l’activité physique, les initiatives digitales ciblant spécifiquement les seniors restent parcellaires.

De plus, malgré les bénéfices mis en avant par les offreurs, l’acceptation et l’utilisation des outils digitaux ne peuvent se faire que si ces derniers répondent aux besoins de cette partie de la population.

Ainsi, cibler les consommateurs seniors nécessite avant tout d’analyser en détail ce marché plus disparate qu’il n’y parait.

3 segments de consommateurs seniors

Le vieillissement est un processus hétérogène, tant sur le plan physique que psychologique ou social. En raison de sa multidimensionnalité, les critères de segmentation classiques comme l’âge chronologique ou encore le fait d’être à la retraite ou non s’avèrent peu opérants.

Il convient d’intégrer des dimensions d’ordre social, familial, professionnel ou physique. C’est ce que montre une étude publiée récemment en mettant en lumière trois profils de seniors indépendamment de leur âge chronologique fondés sur leur pratique d’activité physique ainsi que sur leur rapport aux outils digitaux (tablettes, domotique, GPS, montres connectées, etc.).

  • Les « Engagés » qui pratiquent régulièrement et parfois même de façon intensive une activité physique utilisent largement les outils digitaux dans leur pratique sportive. Ils se sentent compétents et affirment les maîtriser : ils s’appuient sur le suivi des performances, les retours d’information, les notifications et les suggestions d’activités pour soutenir ou renforcer leur activité physique.
Certains outils permettent d’adapter les programmes sportifs aux envies et besoins précis de chaque personne. Mladen Zivkovic/Shutterstock
  • Les « Attentifs » qui montrent davantage de méfiance envers les outils digitaux auxquels ils reconnaissent une grande utilité notamment dans leur pratique d’activité physique. Ils peuvent parfois être dépassés et avoir le sentiment de ne pas les maîtriser. Un accompagnement humain à leur utilisation permettrait d’engager ces seniors dans une activité physique régulière.

  • Les « Contraints » qui pratiquent peu d’activité physique et ne reconnaissent pas forcément l’utilité des outils digitaux ou ne se sentent pas compétents pour les utiliser, constituent la troisième catégorie. Une des solutions pour les sensibiliser aux bienfaits d’une activité physique régulière sur leur bien-vieillir, est de leur montrer les avantages que procurent des outils digitaux simples d’utilisation et personnalisables.

Cette segmentation permet de comprendre comment s’adresser aux différents profils de consommateurs seniors. Elle permet également d’identifier les améliorations à apporter aux outils digitaux pour correspondre à la diversité des besoins et usages et faire progresser le taux d’équipement en outils digitaux des seniors, notamment les plus âgés.

Les 60-69 ans globalement mieux équipés

En France, le taux de pénétration (proportion de consommateurs ayant acheté un produit digital sur une période et un marché donnés) dépend de l’outil considéré et de l’âge.

 Le sentiment d’intégration à la société digitale marque un vrai décrochage à 70 ans. Baromètre les seniors et le digital TNS Sofres
Le sentiment d’intégration à la société digitale marque un vrai décrochage à 70 ans. Baromètre les seniors et le digital TNS Sofres


Ainsi, plus de 80 % des 60-69 ans ont un téléphone mobile contre 66 % des 70 ans et plus ; la proportion de smartphones diminuant avec l’âge. Pour ce qui est des tablettes tactiles le taux d’équipement est de 41 % des 60-69 ans contre 29 % des 70 ans et plus.

Une étude publiée en 2018 montre que les seniors sont enclins à accepter et utiliser des technologies liées à la santé si celles-ci respectent certains critères comme : leur procurer indépendance et sécurité, leur donner la possibilité de gérer de façon autonome leur santé ou encore de maintenir des liens sociaux avec leurs proches.

En revanche, l’atteinte à la vie privée ou le manque de sécurité quant à leurs données personnelles constituent d’importants freins à leur adoption.

Ainsi, alors que les seniors s’approprient de plus en plus les technologies, il revient aux entreprises de développer les meilleurs outils digitaux permettant d’aider ces catégories spécifiques de consommateurs à se maintenir en bonne santé.

À l’heure où des robots deviennent des compagnons des personnes les plus âgées ou ayant des difficultés de santé majeures en prenant soin d’elles, pourquoi ne pas imaginer qu’ils deviennent aussi des compagnons d’activité physique au quotidien ?The Conversation

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

Publié le3 août 2020
Mis à jour le24 août 2020