Les 6 et 7 juillet prochains, une caravane composée de chevaliers en armure comme à l’époque de François 1er et du Chevalier Bayard, franchira le col de Mary à 2600 m d’altitude dans les Alpes de Haute Provence pour rejoindre l’Italie.
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Ce projet a pour but de restituer les conditions matérielles et humaines du franchissement des Alpes par les troupes de François 1er en 1515 afin d’en mesurer scientifiquement la performance. Il associe des scientifiques de la recherche publique à des partenaires issus du monde associatif et de l’entreprise. L’archéologie expérimentale mise en oeuvre ici favorise un fort rayonnement social et culturel, sinon une forme de médiation entre la recherche universitaire et la société civile. » précise Stéphane Gal, enseignant-chercheur de l’Université Grenoble Alpes, historien porteur du projet au sein du
Laboratoire de recherche historique Rhône-Alpes (LARHRA – CNRS / UGA/ Universités Lyon 2 et 3 / ENS Lyon).
Ce projet d’expérimentation historique porté par le
Labex ITEM (Innovation en Territoires de montagne) associe des chercheurs d’
Inria Rhône-Alpes et des laboratoires
Grenoble Images Parole Signal Automatique (Gipsa-Lab – CNRS / UGA / Grenoble INP) et
Hypoxie et Physiopathologies cardiovasculaires et respiratoires (HP2 – UGA / Inserm) mais également la 27e brigade d’infanterie de montagne, des étudiants de l’UGA et Patrick Ceria, triple champion paralympique.
Le projet MarchAlp reçoit par ailleurs le soutien financier de nombreux partenaires académiques et privés dont le Labex ITEM, le CNRS, le Département de l’Isère et la Société Bayard Capital.
L'expérimentation scientifique
Si de nombreuses expériences d’archéologie expérimentale ont déjà été réalisées autour de cette période, aucune ne s’est déroulée dans la montagne à l’échelle envisagée par MarchAlp. Les grandes reconstitutions organisées en 2015 autour du 500e anniversaire de Marignan n’ont pas abordé le thème du franchissement alpin de l’été 1515.
Les objectifs scientifiques de la mission MarchAlp : évaluer le matériel et mesurer l’effort humain. Afin de mesurer l’effort humain, des tests physiques seront réalisés sur la journée de marche, en montée et en descente, à pied et à cheval (rythme cardiaque, effort respiratoire, sudation, hydratation).
Le matériel fabriqué pour l’opération sera également testé en laboratoire biomécanique par le Gipsa-lab, HP2 et Inria Rhône-Alpes et sur le terrain dans des conditions proches de celles de 1515 (efficacité mécanique du matériel, amplitude des mouvements, adaptations nécessaires, descente de cheval, pose de certaines parties de l’armure…).
Protocole expérimental effectué à l’Inria
La plateforme Kinovis d’Inria située à Montbonnot est financée par un Equipex du Plan Investissement d'Avenir 2011 autour d'un consortium rassemblant Inria, l'Université Grenoble Alpes, Grenoble-INP et le CNRS. Cette plateforme permet aux partenaires académiques et industriels de réaliser des reconstructions de surface 3D en mouvement pour n'importe quelle scène. Le principe consiste à fusionner l'information géométrique de 68 caméras pour générer des formes 3D ainsi que leur apparence couleur. La plateforme comprend aussi un système de capture de mouvement par marqueurs pour des mesures précises de trajectoire 3D.
Les expériences réalisées par le chercheur Lionel Reveret du laboratoire Jean Kuntzman pour MarchAlp ont déjà permis d'effectuer une analyse biomécanique 3D précise de Stéphane Gal et Patrick Ceria pour évaluer l'effet de l'armure sur la liberté de mouvement de leurs articulations.
Le système avec marqueurs permet de mesurer avec précision les caractéristiques articulaires. Il a été utilisé avec Stéphane Gal et Patrick Ceria sans armure pour déterminer leurs caractéristiques intrinsèques.
Avec armure, ce type de système par marqueurs n'est cependant pas adapté à cause des multiples réflexions des éléments métalliques. Par contre, le système de reconstruction vidéo de surfaces 3D en mouvement a pu fournir de bons résultats dans ces conditions. Ce système a permis de restituer la surface 3D de l'armure en mouvement, avec une précision certes moindre qu'avec des marqueurs pour l'analyse articulaire, mais avec l'avantage de ne pas être perturbé par les réflexions des pièces métalliques. Cette expérience a donc permis de comparer l'amplitude des degrés de libertés articulaires, avec et sans armure, et ainsi de quantifier numériquement à quel point l'armure limite la souplesse de mouvement.
Batterie de tests, avec et sans armure, effectués sur la plateforme Kinovis à L’Inria. 68 caméras, 13 ordinateurs et trois jours de calculs à chaque fois… L’idée est de pouvoir mesurer le plus finement possible les contraintes de l’armure pour chacun des expérimentateurs.
Protocole expérimental réalisé par les équipes Saïga du Gipsa-Lab et Hypoxie-Exercice du Laboratoire HP2
Divers tests ont été réalisés afin d’évaluer les effets biomécaniques et physiologiques du port de l’armure sur la locomotion en situation de dénivelé. Un tapis roulant (Zebris®) inclinable est utilisé afin de reproduire les conditions de marche en montée et en descente propre à la montagne.
L’objectif de ces mesures est d’évaluer l’effet du port de l’armure sur les caractéristiques de la marche comme : la longueur du pas, le temps d’appui, l’intensité et la répartition des forces d’appui au sol, les coordinations articulaires du membre inférieur, le coût énergétique global apprécié par la mesure de la consommation d’oxygène (Metalyzer®) et la fréquence cardiaque. L’ensemble de ces tests ont été effectués par les chercheurs Violaine Cahouet, Franck Quaine du Gispa-Lab et Patrice Flore Laboratoire HP2.
Analyse biomécanique de la locomotion avec et sans armure en situation de dénivelés positif et négatif avec mesure des échanges gazeux au sein du CUBE, Centre Universitaire de Biologie Expérimentale de l’UFR Chimie Biologie de l’Université Grenoble Alpes.
Le projet MarchAlp à l'honneur sur TéléGrenoble